Le nouvel impôt sur la fortune immobilière va alourdir la charge des propriétaires
Dans son programme fiscal, Emmanuel Macron a préconisé de concentrer l’ISF, impôt sur la fortune, pour le transformer en un nouvel impôt à venir sur la fortune immobilière. Que faut-il en attendre ? Sans doute rien de bon. Pour diverses raisons certes économiques, mais pas seulement.
Sur le plan économique, cela va proportionnellement alourdir un peu plus la charge qui pèse sur les propriétaires immobiliers et fonciers par rapport aux autres épargnants. Autrement dit, éloigner encore les investisseurs de ce secteur. Or, l’immobilier est stratégique et vital. Quand un pays connaît une crise du bâtiment ou de l’immobilier, c’est toute son économie qui s’en ressent.
La catastrophe des subprimes l’a suffisamment montré. Pourtant l’immobilier français est déjà surtaxé. Non seulement à cause des charges sociales qui pèsent sur les entreprises du bâtiment, grandes consommatrices de main d’œuvre, mais aussi parce que la propriété immobilière subit un nombre toujours croissant d’impôts.
Le capital affronte, par exemple, taxe foncière, taxe d’enlèvement des ordures ménagères, taxes d’aménagement, taxes d’urbanisme, droits de mutation en constante augmentation et autres taxes sur les logements vacants, sur les terrains devenus constructibles, sur les friches, surtaxe sur les résidences secondaires etc. Quant aux revenus fonciers, quand il en reste, ils peuvent être imposés à près de 65 % en additionnant impôt sur le revenu, prélèvements sociaux et contribution sur les hauts revenus.
En ajoutant l’ISF à tous ces impôts largement dissuasifs, il était déjà difficile de convaincre un investisseur de s’engager en France et encore plus dans l’immobilier, par hypothèse non délocalisable. Si l’impôt sur la fortune devient demain un impôt propre à l’immobilier, il va donc clairement devenir repoussoir pour ce type d’investissement, d’autant que son caractère confiscatoire ne lui sera pas ôté. Autrement dit, les investisseurs ou épargnants s’écarteront de l’immobilier par réflexe, pour fuir la confiscation qu’ils ressentent en payant cet amoncellement d’impôts.
Les conséquences seront alors néfastes pour tout le monde : le bâtiment en ressentira les effets puisque le neuf sera aussi touché, avec les effets induits en termes d’emploi ; les locataires le sentiront aussi passer puisqu’un propriétaire est toujours tenté de reporter une charge sur son locataire en augmentant le loyer pour tenter de conserver un rendement net ; les petits propriétaires ne seront pas non plus épargnés puisque si l’immobilier devient la bête noire de l’Etat, il y a fort à parier que cela jouera sur les prix, alors que le marché doit déjà faire face à une bulle en préparation.
Sans oublier la clientèle étrangère qui restera toujours aussi méfiante à l’égard d’un marché français aussi lourdement taxé. Car l’ISF sur l’immobilier français frappe même les non résidents, quand le soleil méditerranéen brille également en Italie ou en Espagne.
Plutôt que la suppression totale de l’ISF comme demandée par Contribuables Associés, cette concentration de l’impôt sur le patrimoine immobilier risque d’être fortement négative.
Le gouvernement en attend un retour de nos exilés fiscaux et un déplacement de l’investissement immobilier soi-disant inerte vers des placements boursiers paraît-il dynamique. On peut pourtant s’interroger sur ce type de motivation qui revient à pénaliser un type d’investissement par rapport à un autre. Le placement en bourse est tout à fait honorable mais pourquoi le favoriser au détriment de la pierre, alors qu’un pays a tout autant besoin de logements ou de terres que d’usine ou de services. L’action en bourse doit-elle être récompensée parce qu’elle est mobile et représente l’international et l’immeuble puni parce qu’il ne peut voyager et reste donc soumis à son pays d’attache ? Rien ne le justifie.
L’épargnant bon père de famille est aussi honorable et utile que le jeune trader sans frontières.
Comme nous le disions en mars dernier, le projet d’impôt sur la fortune immobilière repose donc sur une posture idéologique déconnectée de la réalité.
D’autant plus irréaliste que ses initiateurs ne savent par exemple pas quoi répondre à l’objection de la pierre-papier. Les actions investies dans l’immobilier doivent-elles être exonérées au titre de la bourse ou taxées à ce nouvel ISF au titre de la pierre ? En allant plus loin, un loueur en meublé professionnel pourra-t-il être exonéré au titre des biens professionnels ? Autant de questions essentielles qu’il suffit de poser pour réaliser l’inanité du projet en cours.
Il n’est d’ailleurs pas certain que le Conseil constitutionnel lui-même ne s’interroge pas sur la conformité d’un tel dispositif, empreint tout à la fois de paradoxes et d’incertitudes juridiques.
Olivier Bertaux
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je suis étonné que personne ne s’interroge sur le doublon taxe foncière/ISFi.
Nous voici promis à deux impôts sur le foncier, dont les valeurs servant de base de calcul sont différentes, l’une évaluation purement administrative, l’autre au prix du marché; les assujettis sont choisis sur deux seuils différents; et ,cerise sur le gâteau, nul ne conteste que l’évaluation administrative est déconnectée de la réalité faute d’avoir été tenue à jour( ce qui devrait poser question sur le fonctionnement de nos services fiscaux).Et personne ne suggère que peut être on pourrait simplifier!
Et semble t il personne n’étudie la disparition de la taxe foncière ,dont tous disent tout le mal possible, au profit d’un ISFi qui pour l’instant parait plus être une idée, qu’un projet réfléchi.
Je reviens sur l’argument central: Quand le bâtiment va,tout va.
Est ce vrai? Non. Mettre ses économies dans le foncier est un réflexe de défiance vis à vis du futur national d’une part; et c’est faire le plus mauvais usage de son capital vis à vis de la collectivité d’autre part.
Car c’est faire monter des prix qui en France sont bien trop élevés, et freinent sérieusement la mobilité des travailleurs. Mais c’est aussi refuser de prendre le risque de soutenir notre reste d’industrie, ou de participer au financement de nos dettes.
Et puis cette idée qu’il est bon vis à vis du chômage d’offrir des postes de travail interne quelque soit l’utilité réelle de ce travail est du même tabac que les emplois aidés dont l’administration est si friande.
Encore une fois ,il faut construire pour faire baisser les prix des logements des actifs; et le premier travail à faire est donc de déréglementer le plus possible( par exemple,à chaque chantier électrique je découvre des astreintes nouvelles année après année, est ce raisonnable?)
Il y a à boire et à manger dans cet article. D’abord personne n’a dit que le barème de l’ISF va monter :enlever les actions de l’assiette ne fait monter l’impôts sur aucun immeuble, au contraire.
Ensuite que les étrangers achètent moins de maisons en France est de nature à faire baisser les prix, ce qui est excellent; la contrepartie est qu’ils iront dépenser leurs sous ailleurs, ce qui n’est pas bon.
Enfin ,je ne devine pas l’idéologie supposée par l’auteur: l’exécutif veut favoriser l’accumulation de capital en France, qui va le lui reprocher? Mais il ne peut baisser ses recettes fiscales pour cause de mauvaise gestion de nos finances publiques depuis une éternité, d’où des compromis boiteux.
Et puis la chose la plus importante est notre balance commerciale qu’il est urgent de rendre positive; bâtir en France ne sert à rien de ce point de vue. Par contre bâtir moins cher, serait un bon objectif, si les logements sont implantés là où il y a de la demande réelle (par opposition à celle dite dans les pub.)
Je souscris tout à fait à l’idée qu’un investisseur immobilier est tout aussi honorable qu’un investisseur boursier surtout pour le patrimoine ancien, particulièrement en campagne qui est en train de péricliter parce qu’on favorise trop par contre la construction neuve. Il faut aider le bâti ancien car nos petites bourgades de campagne ressemblent de plus en plus à Beyrouth des années 80 ou Mossoul aujourd’hui. Pas par fait de guerre, mais parce que plus personne ne trouve intérêt à faire vivre ces murs (logements, commerce…). De plus en plus de volets tirés et de rideaux baissés. Et ça n’inquiète pas grand monde.
Hormis cela, la politique fiscale ne doit pas se faire à l’aune de l’intérêt économique de tel ou tel groupe corporatiste ou d’intérêt.
La politique fiscale doit se faire en fonction de l’idée que l’on se fait de la justice sociale, ou plutôt pour ne pas être mal compris : sociétale (sans esprit partisan gauche/droit)
Désaccord: la politique fiscale a pour objet de financer l’état, en perturbant le moins possible l’activité du peuple.Ce qui signifie que l’état doit d’abord être frugal!
Ensuite il y a la redistribution, dont l’objectif est la cohésion sociale. C’est une autre affaire.