Quid de la taxe carbone à l'étranger?
Dans la newsletter de l’IREF, l’Institut de Recherches Economiques et Fiscales, maître Jean-Philippe Delsol présente le poids fiscal de la taxe carbone dans les pays voisins qui l’ont instauré. Le résultat est édifiant : sans véritables résultats sur les émissions de CO2, elle est assurément lucrative pour l’Etat…
« L’introduction de la taxe carbone dans quatre pays de l’Union Européenne, en Finlande, en Suède, au Danemark et au Royaume-Uni, ne semble pas avoir eu d’effets spectaculaires.
La facture énergétique a été réduite et l’innovation a été stimulée, mais surtout, l’Etat a gagné des recettes nouvelles. Ces impôts rapportent 500 millions d’euros par an en Finlande, 3 milliards d’euros en Suède. Le record revient au Danemark, où leur produit représente chaque année l’équivalent de 5% du PIB. Cette fiscalité verte a été compensée par une baisse des impôts sur le revenu, ou des cotisations sociales. Certains pays l’ont même utilisée pour réduire le coût du travail. En Grande Bretagne, l’argent collecté finance des réductions de cotisations patronales.
Il reste que, même sous le bénéfice du « green shift », les effets de cette nouvelle fiscalité et plus généralement de mesures retenues pour réduire les gaz à effet de serre sont encore mal connus et mal maitrisés. (…)
Plus prosaïquement, l’UFC-Que Choisir reste fermement opposée à la taxe carbone sur les carburants car, dit-elle, elle aura un impact très négatif sur le pouvoir d’achat et ne permettra pas de réduire les émissions de gaz à effet de serre. De 1995 à 2006, constate l’association, les prix TTC du carburant ont augmenté de 66 %, ce qui n’a pas empêché la consommation de croître de 7,6 %, ajoute-t-elle. On peut déduire de ces données que l’ élasticité-prix de la consommation d’énergie ou de l’émission de gaz est très faible, de sorte que ce n’est pas en rendant plus coûteuse la pollution des particuliers qu’on diminuera le pollution totale.
La seule certitude est que nous n’avons aucune certitude. Le principe de précaution, utilisé d’ailleurs à tort et à travers, n’exigerait-il pas alors qu’avant d’instituer de nouvelles taxes, les effets en soient plus précisément établis ? A quoi sert-il d’utiliser le principe de précaution sans précaution ?
Un bond fiscal « sans équivalent »
La taxe carbone apparaît en fait pour les gouvernements comme une nouvelle opportunité de recettes fiscales. Certes, la neutralité est assurée aujourd’hui, du moins nos gouvernants la promettent-ils. Mais déjà d’autres disent que ce n’est qu’un début. « La hausse des impôts est inévitable » a écrit Didier Migaud ( Le Monde 11/06/09).
Pour sa part, Michel Rocard, le « créateur » de cette taxe, explique qu’il s’est engagé à travailler avec sérieux à une réforme « sans équivalent depuis l’instauration de l’impôt sur le revenu ». C’est précisément ce qui est inquiétant quand on se rappelle que l’impôt progressif sur le revenu instauré au taux de 3 à 4% en 1914 était passé à 50% dès 1920. « Il faut bien comprendre, a d’ailleurs déclaré Michel Rocard sur BFM le 10 juin, que cet outil fiscal doit commencer petit pour ne pas bouleverser la vie, les gens, tous les comportements, mais il doit augmenter assez vite ».
La tentation sera forte d’utiliser la taxe sur l ‘énergie comme une nouvelle manne pour les Etats en mal de ressources fiscales. La Finlande, où le gouvernement a besoin de nouvelles recettes pour compenser la baisse des charges patronales, envisage déjà un relèvement de la taxe. »